E.J : Jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour plaire, avoir de la reconnaissance et être dans les bonnes grâces des gens au pouvoir ? Ici, on parle du roi, mais n’importe quelle forme de pouvoir, que ce soit une direction artistique de théâtre, le maire de la Ville, le PDG d’une entreprise. Comment l’ambition et le désir de briller peuvent mettre à l’épreuve nos valeurs ou influencer nos manières d’agir les uns avec les autres ? Donc je dirais que l’un des thèmes principaux, c’est la relation entre l’art et le pouvoir. On se rappelle que dans ce temps-là, il n’y avait pas de Conseils des arts. L’artiste devait avoir un protecteur, un noble qui aimait ce qu’il faisait et qui le protégeait, le finançait, etc. Mais Louis XIV a vraiment pris Molière sous son aile et l’a propulsé à un autre niveau.
Et c’est un timing historique de fou, cette rencontre entre les trois. Si Lully n’était pas arrivé à Paris à tel moment ? Si Molière ne s’était pas présenté devant le roi, est-ce qu’il serait devenu Molière ? Est-ce que Louis XIV serait devenu ce roi extraordinairement solaire et flamboyant, n’eût été cette rencontre ? Il a « matché » Molière et Lully. Il a fait : « Toi t’es hot, toi t’es hot, faites quelque chose ensemble ! » Ça a donné des pièces avec beaucoup de texte, de la musique, des intermèdes, des improvisations, de la danse. C’était visionnaire. Ces trois-là, ça a fait pataclow ! Comme une réaction chimique. Sans l’un des éléments, on ne sait pas ce que ça aurait fait.